Astronome, prêtre catholique, physicien, professeur, Georges Lemaître est un scientifique belge du 20ème siècle aux multiples casquettes. Ses recherches sur l’Univers et son expansion, qui ont peiné à se faire une place parmi ses pairs, sont pourtant fondatrices de la désormais célèbre théorie du Big Bang.
Études et jeunesse
Georges Lemaître nait le 17 juillet 1894 à Charleroi, en Belgique. Intéressé par la science dès son plus jeune âge, il interrompt ses études d’ingénieur au début de la guerre de 1914 pour s’engager dans l’armée. Quand il revient de la guerre, il reprend des études de mathématiques et de physique. C’est d’ailleurs en mathématiques qu’il effectue sa thèse, qu’il soutient avec brio en 1920.
Mais c’est à la physique qu’il va ensuite principalement s’intéresser, car il étudie de près la théorie de la relativité d’Einstein ; il obtient ainsi une seconde thèse sur la relativité et la gravitation. Il décide alors de partir étudier à l’étranger : pendant un an en Angleterre, à Cambridge, puis aux Etats-Unis où il soutiendra au M.I.T une thèse sur les champs gravitationnels des fluides deux ans plus tard. C’est au cours de ces séjours qu’il va emmagasiner les connaissances qu’il mettra ensuite à profit pour l’élaboration de ses principales théories. Il revient en Belgique en 1925, où il est nommé professeur à l’université de Louvain ; poste qu’il occupera jusqu’à sa retraite.
Parallèlement à sa carrière de scientifique, Georges Lemaître est également un homme curieux et humble, qui s’intéresse beaucoup à la philosophie (discipline dans laquelle il obtient également un diplôme dans sa jeunesse) et à la religion : il devient prêtre en 1923, et gravira les échelons de l’église catholique jusqu’à devenir Monseigneur Lemaître à la fin de sa vie. Très réfléchi, Georges Lemaître fera toujours une distinction claire entre la science et la religion. Pour lui, les deux disciplines peuvent très bien cohabiter, et la reconnaissance de l’Eglise catholique ne l’a pas empêché d’établir des hypothèses révolutionnaires sur l’origine de l’Univers.
Les théories sur l’univers en expansion
Alors qu’il s’intéresse de près à la théorie de la relativité générale d’Einstein, Georges Lemaître exploite ses idées, ainsi que les théories d’Alexandre Firedmann sur l’expansion de l’Univers, et propose en 1927 une idée étonnante : l’univers est en expansion car il est de rayon croissant, et non statique comme le pensent la plupart de ses pairs, dont Albert Einstein lui-même. Il établit également que les galaxies s’éloignent entre elles à une vitesse proportionnelle à la distance qui les sépare selon une constante qu’il estime. Ces résultats seront repris ensuite par Edwin Hubble après la traduction du texte de Lemaître en anglais, et on donnera le nom de la constante à Hubble, le scientifique belge ayant demandé à ne pas traduire le passage sur cette estimation.
En prenant en compte ses résultats sur un Univers en expansion, Georges Lemaître imagine alors sa dynamique en sens inverse, pour en déduire une seconde théorie : celle de « l’atome primitif » ; si l’Univers s’étend perpétuellement, cela implique qu’il n’était à l’origine qu’un unique atome, synonyme de début de l’Univers. Cette théorie sera appelée ironiquement « Big Bang » dans une émission de radio, par l’un des nombreux scientifiques toujours persuadés que l’Univers est statique. Il postule également que ce début temporel ait laissé des traces visibles, portées par le rayonnement cosmique. Il nomme ces traces « l’écho disparu de la formation des mondes ».
La reconnaissance des pairs
Bien que ses découvertes soient révolutionnaires et totalement fondées scientifiquement, les idées de Georges Lemaître ont été longues à s’imposer et à être démontrées, tant elles étaient en avance sur leur temps. Ainsi, Einstein a longtemps dénigré les travaux sur l’expansion de l’Univers, même s’il admettait leur exactitude scientifique. Mais ces résultats seront confirmés par la suite : en 1929 pour l’Univers en expansion, et en 1965 (quelques mois avant la mort de Lemaître) pour l’atome primitif, avec la découverte fortuite de fond diffus cosmologique. Il recevra ainsi de nombreuses récompenses scientifiques, en étant par exemple nommé membre de l’Académie des Sciences belge en 1941.
D’ailleurs, beaucoup de physiciens s’accordent à dire qu’il aurait partagé le prix Nobel de physique de 1978 avec Penzias et Wilson, s’il avait été en vie. Georges Lemaître est donc aujourd’hui considéré comme l’un des fondateurs de l’une des théories les plus importantes du 20ème siècle, en plus d’être un membre éminent de l’Eglise catholique. On lui reconnaît aujourd’hui des découvertes que sa discrétion avait empêchées de son vivant, comme la constante de l’expansion de l’Univers, qui après un vote de l’Union astronomique internationale en 2018, a vu son nom évoluer de loi de Hubble à loi de Hubble-Lemaître.